La Folie D’Annunzio by Olivier Tosseri

La Folie D’Annunzio by Olivier Tosseri

Auteur:Olivier Tosseri [Tosseri, Olivier]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 2283032172
Éditeur: Buchet/Chastel
Publié: 2019-09-11T22:00:00+00:00


X – Le revers de la médaille

Fiume vit « l’année d’holocauste », brûle d’ardeur, proclame solennellement Gabriele D’Annunzio. Ses habitants grelottent et ils ont faim. Les préoccupations nées au moment de l’instauration du blocus par le gouvernement italien se sont vérifiées. Le bois de chauffage et les vivres manquent, le charbon devient introuvable, les vêtements de plus en plus rares. La dégradation de la situation au fil des mois oblige rapidement le Conseil national à imposer des mesures de rationnement sur les produits de première nécessité, en particulier alimentaires. Les restrictions seront sans cesse renforcées, jusqu’à interdire la confection et la vente de tout type de desserts ou encore la consommation de la viande ou des brioches dans les restaurants et les hôtels. « La misère ici est terrible, écrit, dès le 6 novembre 1919, à ses parents Giovanni Boscogrande di Carcaci, un volontaire de 17 ans venu de Sicile. La nuit, on voit des vieillards endormis sur les trottoirs, sous la pluie. Et combien de visages efflanqués de personnes qui ont faim ! Les plus pitoyables sont les enfants. » Sept mille parmi les plus pauvres ou malades seront d’ailleurs dans les semaines qui suivent évacués vers l’Italie par les soins de la Croix-Rouge. C’est elle qui sera chargée d’atténuer les souffrances des habitants de Fiume, son président, le franc-maçon Giovanni Ciraolo, étant par ailleurs sensible à sa cause.

La question de l’approvisionnement de la ville est habilement exploitée par tous. Par Francesco Saverio Nitti, comme un moyen de pression dans ses négociations pour faire céder Gabriele. Par ce dernier, qui peut propager de son côté l’image d’une ville martyre de sa foi, affamée par l’impitoyable président du Conseil. Il fut au contraire sensible à la question humanitaire, autorisant la Croix-Rouge dès le 25 octobre à acheminer carburant, denrées alimentaires et médicaments nécessaires à la population. Durant l’occupation d’annunzienne, elle fera parvenir l’équivalent de 13 millions de lires de marchandises, dont environ 60 000 quintaux de céréales et plus de 400 000 œufs. C’est suffisant pour éviter la famine, mais pas pour la protéger des diverses pénuries et disettes ou pour provoquer un soulèvement de masse contre les troupes du Comandante. « Le blocus paralyse la ville, constate Léon Kochnitzky, l’anémie économique avec l’arrêt complet de l’activité du port la fait mourir de mort lente. La faim, la maladie à la porte du pauvre deviennent au seuil du riche la tentation ; on s’adonne aux affaires louches et aux marchés inavouables : on commence par spéculer, puis on trompe, on marchande, on arnaque. On doit bien vivre ; et on devient “amasseurs”, ou, mieux, “requins”. »

Les étals des magasins se vident de leurs fruits et légumes, le prix de la viande bondit faramineusement, tandis que les œufs et le lait sont pratiquement introuvables, tout comme le pain et la farine. On continue pourtant, pendant de longues semaines, à trouver en abondance chocolat, crème fouettée et pâtisseries. Quant aux journaux locaux, ils consacrent des pages entières à des réclames, où les parfums de luxe, le champagne et autres vins fins occupent les places de choix.



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